Pour que vive la Méthode naturelle telle que Paul Le Bohec la mettait en œuvre
Pour que vive la Méthode naturelle telle que Paul Le Bohec la mettait en œuvre

L’arbre de la connaissance

Ève d'Autun, bas-relief provenant de la cathédrale Saint-Étienne d'Autun et exposé au musée d'Autun, se montrait au musée du Louvre suite à sa restauration. Avant son retour au pays, Pierre et moi sommes allés l'admirer. Toujours aussi superbe ! Elle nous a accueillis toujours avec son air malicieux, son regard dévoilant intelligence, plaisir, joie de vivre.

Je me suis prise d'intérêt pour le personnage d'Ève et ses diverses représentations. À chacun de nos voyages,  je ne manquais pas de visiter tous les lieux où je pouvais la rencontrer et je rapportais des images.

Mais pourquoi donc Ève m'intéresse-t-elle autant ? Que peut-elle avoir de commun avec moi ?

Eh bien l'arbre de la connaissance ! Elle ne supportait plus de ne pas savoir, elle voulait connaître ce qu'il y avait au-delà du « tour de sa maison ». Alors  elle cueillit le fruit de l'arbre de la connaissance et depuis la joie se lit dans ses yeux.

Du plus loin que je me souvienne, j'ai toujours eu en moi ce désir de comprendre. Pour exemple cette réticence à apprendre par cœur des formules toutes faites en algèbre ou en trigonométrie, je me les réinventais avant de les utiliser.

Maintenant lorsque mon ordinateur me pose un quelconque problème, je n'accepte pas de ne pas comprendre et je ne lâche pas les investigations avant d'avoir compris ce qui avait pu se passer, et ceci sans entendre les moqueries amicales de Francine : « Ça va te préoccuper tant que tu n'auras pas compris ! »

Pour en venir à la classe, j’avais pour préoccupation que les enfants comprennent ce qu'ils apprenaient, qu’ils ne travaillent pas mécaniquement. Donc j'ai cherché à améliorer ma pratique pédagogique en me cultivant (lecture, stages, actions au sein de l'ICEM), et je me réjouissais de chaque nouvelle découverte que je m'empressais d'expérimenter avec les enfants.

Comprendre permet de mieux vivre et la joie que je montrais en classe était communicative : les enfants me suivaient, développant ainsi leur puissance d'apprendre.

Et c'est en me cultivant, en cherchant que j'ai fini par mieux comprendre comment on apprend.

Trois rencontres ont marqué ma culture pédagogique et si j'ai été marquée par ces rencontres, c'est parce qu'elles sont arrivées comme des réponses, à un moment où mes questionnements étaient fondés, solides, parce que construits sur des observations, des analyses de mes pratiques pédagogiques et de leurs effets sur les enfants. Je sentais que je pouvais être plus efficace et je voulais savoir, j'avais ce besoin de culture. C'était dans les années 80.

La rencontre avec Paul Le Bohec et sa pratique de la Méthode naturelle, méthode de vie, fut l'élément déclencheur qui transforma définitivement ma classe. Dès le lendemain de la rencontre, je mis en place la Méthode naturelle de mathématique. Un air de liberté, de joie est alors entré dans la classe, les enfants et moi prenions plaisir à faire des maths.

Lors d'un stage à Beaumont-sur-Oise sur le dysfonctionnement des apprentissages, j'ai pu comprendre comment on apprend à partir de ce que l'on sait déjà, comment les liens se tissent entre les informations et les savoirs.

Autre découverte : la brochure de Pierre Guérin sur l'importance des représentations mentales initiales dans un processus d'apprentissage.

Ces trois rencontres sont complémentaires, j’ai retenu de chacune d’elles des éléments qui venaient nourrir mes représentations : comment on apprend, l’importance de l’émergence des représentations, la mise en œuvre de l’expression libre au sein du groupe, l’apprendre à penser. Et j’ai ainsi compris d’où venait cette joie qui habitait les enfants et moi-même : c'est parce que nous entrions dans la vraie connaissance, celle que l’on se construit soi-même avec l’aide des autres.

Monique Quertier, janvier 2017