Durant les vacances scolaires, j’organise des stages de trois jours pour enfants à l’abbaye de Maubuisson.
Thème des stages : méthode naturelle de découverte du domaine de l’abbaye.
Abbaye de Maubuisson, premier jour du stage de création multimédia.
Je propose à une enfant stagiaire (10 ans) :
« Blanche, tu ne voudrais pas taper à l’ordinateur le texte que nous venons de composer oralement ?
- Oh non, je ne veux pas.
- Mais pourquoi donc ?
- Je fais trop de fautes. J’ai toujours zéro en dictée à l’école. Et pourtant, on fait des dictées presque tous les jours et même ma mère m’entraîne à la maison à faire des dictées tous les soirs. Mais j’ai quand même toujours zéro.
- Cela ne fait rien, je corrigerai les erreurs quand tu auras fini de taper.
- Oui mais tout de suite pour que personne ne voie les fautes. »
Blanche tape le texte aidée de sa copine Guillemette et aussitôt je corrige les erreurs en expliquant ce que je fais : « là je mets nt, le verbe est au pluriel, ce sont les deux enfants qui avancent… j’écris aient au bout du verbe, le verbe habiter est conjugué à l’imparfait… ici, il faut deux s, sinon ça fait poison… etc. »
Le lendemain, Blanche et Guillemette arrivent au stage en disant : « Aujourd’hui, nous tapons nos textes à l’ordinateur. »
Nous procédons de la même façon que la veille : elles écrivent et je passe derrière pour corriger, avec des explications sur tout ce que je corrige.
Troisième jour de stage, Blanche s’est installée à l’ordinateur. Elle écrit un texte que lui dicte un plus petit. Et alors j’entends : « Dis, Guillemette, je dois bien mettre nt à regarde et non pas un s, c’est bien un verbe au pluriel ? »
Monique Quertier, janvier 2008
« L’orthographe est une composante importante de la langue française. Il faut donc se soucier de permettre aux enfants d’en acquérir la maîtrise. Mais il vaut mieux commencer très tôt à en assurer les bases parce qu’en cette matière, les mauvaises habitudes sont vite prises et il est difficile de s’en défaire. Aussi, il faut s’en préoccuper dès le CP. Cependant, dès le départ, on peut très bien mettre les choses sur la bonne voie sans pour cela que ni les enfants, ni les familles, ni les maîtres en fassent une maladie. Il faut simplement associer la pensée à la forme sans se focaliser sur celle-ci.
À mon avis, pour en assurer au mieux la maîtrise, il faut prendre en compte deux données essentielles :
– L’orthographe d’usage française n’est pas bâtie sur la logique : on sait qu’on peut apprendre par analyse consciente ou par imprégnation inconsciente. Il est clair que le français écrit qui a pour base la multiplicité des possibilités de transcription des sons de la langue parlée ne peut être assimilé que de la seconde façon.
– La mémorisation est liée à l’affectivité : « L’affectivité est toujours présente dans la connaissance, ne serait-ce qu’à titre d’accompagnatrice. » (Edgar Morin)
Paul Le Bohec, L’acquisition de l’orthographe (L’orthographe, cette indispensable !), extrait, 2007